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Matez les, Matelots. [PV LJB]

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Bunny Joy

Feuille de personnage
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Bunny Joy
Lieutenant
Mar 7 Mai 2024 - 0:14
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On dit souvent qu’un malheur n’arrive pas seul, mais on oublie de dire que souvent, c’est la loi des séries qui s’applique à nos vies ; Une pluie d’emmerdes, des hectolitres déversés devant nous, et on doit juste faire avec, régler ça petit peu par petit peu. Après tout, elle l’avait toujours sû, depuis l’abandon de sa mère, jusqu’à ce jours là, que c’était petit pas par petit pas qu’on arrivait à la destination de notre choix. En fin de compte, ce n’était pas la chute qui comptait, mais l’atterrissage. Pas le chemin mais la destination. Pas les motivations mais le but atteint. Elle était comme ça, elle n’y pouvait rien. Un brin de nonchalance, deux pincées de force de la nature, le tout enrobé par ce caractère explosif. On lui avait toujours dit que cela lui porterait préjudice. Pour l’instant, elle s’en sortait. Pas de la meilleur des manières, certes, bonne dernière de tout ce qui sortait des aptitudes physique, comme si elle avait le cerveau sur pause, obnubilé par un seul objectif … Elle était difficile à décrypter, son impulsivité la rendait difficilement lisible ou prévisible.

Ce jour là, l’exercice était à taille humaine. Des équipes formées par un hasard incertains, des hommes et des femmes qui devaient coopérer pour suivre les ordres. L’instructeur avait été clair dans ses directives : Ceci est un exercice important pour votre formation, celui ou vous devez nous montrer que ce qu’on vous à apprit n’est pas ressortie par l’autre oreille ! Vous allez simuler une attaque de fort, l’équipe d’en face devra quand a elle le défendre, on vous a fournis des fusils et du matériel neutralisé, qui tire de fausses munitions colorant leur cible en rouge … A vous de jouer, soldat, montrez nous ce que vous savez faire !

Un Hourra, avait échappé des lèvres des soldats comme un cri de guerre … Pendant ce temps là, Bunny se curait le nez, approchant du tableau qui disait le nom et la formation des équipes. Elle se rangea avec ses camarades de l’équipe Bravo, les jaugeant du regard. Fatalement et sans surprise, ce n’était pas le haut du panier qu’on lui avait refourgué.

Un blanc bec avec une mèche lui tombant sur le coté d’un visage placide et dont elle n’avait rien à dire, si ce n’était qu’il ne fut beau en tout les cas, entreprit les présentations… Elle laissa tout le monde se présenter, les toisant d’un regard hautain.

- Matelot Joy, mon rôle principale c’est s’occuper de la charpenterie, mais je suis aussi là pour foutre des torgnoles … Faites pas la gueule, sinon sa risque d’être aussi pour vos pommes, j’ai pas envie que l’exercice foire … Fit-elle tout d’une traite, sans laisser personne lui couper la parole.

Elle n’aimait pas trop qu’on essaye de saboter ses prérogatives de femme musclée, et encore moins par des culs terreux … Pas sympa ? Toute sympathie l’avait quittée en voyant l’équipe de cas sociaux et de bras cassés qui l’accompagnerait.. . Vraiment ? Et en plus c’était l’équipe « Bravo » ? « Bravo d’avoir fait foirer mon exercice monsieur l’instructeur » était plus judicieux et juste, elle en convenait avec beaucoup de facilité … Mais tu n’es pas au bout de tes peines chères lecteur, car le navire qu’on leur avait confié sentait encore plus la défaite !

- Eh bah, on ne va pas aller loin avec ça ….

- Toute façon vous non plus … Rétorqua l’instructeur qui se trouvait malheureusement derrière elle.

- Equipe bravo, je compte sur vous, vous êtes les derniers mais non des moindres à passer à l’attaque, quand la cloche retentira, vous pourrez aller à votre embarcation, mais pas avant, sinon ce sera la disqualification … ! Et il disparut aussi vite qu’il était arrivé.

Elle toisa les autres gars, qui eurent des sueurs froide pour certains, tandis que le dénommé Louis semblait se gargarisait dans sa propre inutilité.

Spécialiste des escargophone ? Et puis quoi encore … Glandeur ouai !
Louis-Jin Bestag

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Louis-Jin Bestag
Lieutenant
Mer 8 Mai 2024 - 11:23
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Ils appelaient ça un « exercice bateau », cela, car l’exercice était élémentaire et qu’il impliquait l’usage d’un navire. C’était un jeu de mot, en somme. Car on ne manquait pas d’humour à la Marine mais, on manquait d’officiers compétents dans ses rangs ; ergo l’exercice bateau.

1620, année du crime ; celui qui vient. Louis-Jin Bestag, alors aspirant officier, se compromettait dans une troisième et dernière année d’étude à l’académie de Marine de West Blue. Il fallait au moins ça pour que la grande Mouette modela sa chair à canon ; pour qu’un homme honnête, ou presque, porta l’uniforme et le grade. Il allait justement en prendre pour son grade, le cadet Bestag ; futur lieutenant de son état. Les prémices du malheur s’étaient annoncés sans frapper à la porte. À l’armée, on y enseignait l’ordre et la discipline, mais manifestement pas le savoir vivre.

Sous escorte de deux cadets – deux cadettes, très exactement – dont la rumeur voulait qu’il les formait autant sur le plan académique qu’il les déformait en d’autres occurrences, le lieutenant-instructeur Farjilles effectuait alors son entrée. « Garde-à-vous », criait, comme de coutume, le premier à apercevoir un supérieur dans les dortoirs. Avec soudaineté et vigueur, la petite assemblée de futures recrues se dressait, synchrone, pour être plus raide que devant un défilé de majorettes. Un élément jura dans le paysage cependant, car cela aussi était de coutume : le cadet Bestag. Lui, généralement affairé à étudier sur un pupitre à côté de son lit, ne se levait jamais en ces circonstances sans grommeler quelques fruits de ses contrariétés, ne se positionnant qu’avec au moins deux heures de retard sur ses mésestimés camarade.

- Repos, repos, feignit comme à son habitude, le lieutenant instructeur, agitant la main dans un geste nonchalant, laissant entendre qu’il n’était pas si porté sur la discipline, bien qu’il fut une incorrigible peau de vache. Je viens aux nouvelles, rien de plus.

Le gloussement deux deux pintades qui le secondaient n’avait même pas été réfréné ; ou si peu. Les garces étaient dans la confidence et ne savaient par conséquent que trop bien quelles « nouvelles » allait se profiler.

- Messieurs, meeeeeesdemoiseeeeelles ♥, figurez-vous que je me fais le messager d’une opportunité extraordinaire.

Chacun, sachant lire entre les lignes à force de connaître ce pernicieux lieutenant, ne sut que trop bien que les emmerdes allaient pleuvoir à verse. Les bonnes nouvelles se faisaient rares le temps d’une instruction militaire ; plus rares encore lorsqu’un officier jurait en être vecteur.

- Dans trois jours, à North Blue, toutes les académies de Marine des Blues organiseront un exercice dont seuls quelques aspirants officiers triés sur le volet auront la joiiiiiiie et le privilège de s’y confronter. De quoi faire joliment reluire votre rapport, sachez-le.

Ou bien de quoi le plomber si la performance mécontenta le jury. À ces petits jeux, rendus fréquents du fait que les officiers instructeurs trompaient l’ennui en les organisant eux-mêmes, on y avait plus à perdre qu’à y gagner. Pour autant, le petit rassemblement de cadets réunis dans le dortoir ne parut pas s’en inquiéter outre mesure. Pas même un tantinet, à dire vrai. C’était à croire qu’ils se savaient certains d’échapper à la pluie, même sous un nuage chargé.

- L’exercice portera sur… Farjilles s’interrompit alors, interpelé par l’agitation venu lui faire frémir sa vision périphérique. Cadet… Bestag, c’est cela ? Puis-je savoir ce que vous êtes en train de faire.

Cette propension qu’il avait à faire semblant de ne pas trop se rappeler de son nom était d’une tartufferie inouïe. Depuis trois ans déjà, Louis-Jin Bestag était devenu, à lui comme à d’autre, le souffre-douleur le mieux trouvé qui puisse exister. Faible, atrabilaire et méprisant à mots à peine couverts l’institution miliaire ainsi que ses compagnons d’infortune, il était ce paratonnerre sur lequel tombait chaque jour ou presque l’ire de ses enseignants. Et c’était encore pour cette raison que personne ne s’inquiéta de se savoir la cible d’une « opportunité », car celles-ci échouaient le plus souvent sinon toujours à ce mauvais élément.

- Je fais mon paquetage, lieutenant-instructeur… Farjilles, c’est ça ? Répliqua avec aigreur le cadet, marmonnant aussitôt une série d’imprécations inaudibles tandis qu’il s’affairait à jeter ses effets dans un sac.

Le lieutenant-instructeur Farjilles, piqué au vif par une impertinence qui se prêtait mal à la communication entre élève et enseignant, qui plus est dans un cadre militaire, ne sut réprimer un petit sourire vicieux. Un de ceux qui lui venaient si facilement aux lèvres lorsqu’il tourmentait ce si mauvais élément.

- Vous quittez l’académie ? Jubilait-il presque depuis son intonation venimeuse.

- Trois ans ensemble et vous jouez encore aux faux-semblants. L’exercice, il est pour moi, hein ? Merci lieutenant-instructeur. Merci. Ajoutait-il entre ses dents serrées, ne s’essayant plus à la flagornerie à son égard, car se sachant systématiquement victime de ses foudres.

Malgré tout soucieux de garder la face devant ce sacrifice insolent qu’il jetait sur l’autel de la Grande Mouette, son tourmenteur s’éclaircît la gorge.

- Je vous trouve bien présomptueux, cadet Bestag. Cet exercice n’est pourtant destiné qu’à ceux ayant excellé dans un domaine technique en particulier. Quelle idée ce serait d’y envoyer un élève aussi… enfin, vous savez.

- Oui, je sais. Je sais que vais y aller. Persistait à ronchonner un aspirant aussi âcre que son instructeur était mielleux.

Quelque peu offensé qu’un subalterne s’adonne si ostensiblement à l’effronterie, Farjilles simula l’autorité. Cela faisait habituellement frétiller les donzelles de son aréopage, celles qu’on baptisait si affectueusement ses « rémoras », mais n’inspirait guère que des haussement de sourcils réprimés chez les plus dignes de la promotion.

- Dois-je vous rappeler, cadet Bestag, ce qu’il en coûte de se montrer si familier envers un supérieur ? Il n’avait en effet pour lui que les sanctions disciplinaires, celles-ci venant compenser ses carences en respectabilité. Prendre l'ombre dans les sous-sol de l’académie vous ferait du bien au teint par cette saison.

L’ironie voulut que, deux ans plus tard, alors affecté au Q.G de West Blue, Louis-Jin fut effectivement embastillé en sous-sol, là où on lui avait abandonné un bureau en pâture. Le fait est que la menace d’aller au trou ne lui titilla pas même l’échine, lui qui était pourtant d’un naturel pusillanime et trouillard.

- Et vous priver de plomber mes résultats avec votre exercice ? J’ai comme un doute.

Louis-Jin avait alors trempé ses mots dans un fiel acide. Le son de sa voix seulement laissait entendre qu’il était au moins aussi teigneux que son officier de tutelle, ce qui ne contribua que peu à l’entente cordiale entre deux hommes étant chacun infects dans un registre qui lui était propre. L’instructeur ne prit d’ailleurs pas la peine de dissimuler un sourire sournois en retour, signant allègrement le crime dont on l’accusait.

Pour perfide et lâche que se trouva être l’aspirant Bestag, ses résultats académiques jouaient de trop en sa faveur. Assez en tout cas pour qu’il échoua un jour à un poste d’officier supérieur. Si une recrue prometteuse n’était en principe pas pour déplaire à la basse amirauté, cet élément-ci leur apparaissait comme une goutte de cyanure liquide dans une eau qu’on souhaitait vierge de toute impureté.

En dépit de ses airs patelins, à tant caresser ses supérieurs dans le sens du poil qu’on le savait hypocrite en diable, Louis-Jin était un bien déplorable Marine. S’il se savait méprisé de ses camarades comme des ses supérieurs, c’était encore car on lui savait une antipathie, sinon caractérisée, au moins larvée à l’encontre de la discipline militaire. Lui, assurément, n’avait pas pris le sentier de l’amirauté pour l’honneur, le prestige ou le sens du devoir ; ni même pour la solde d’ailleurs. Cela fut plus tard consigné dans son rapport : « Le cadet Bestag œuvre auprès de l’institution à la seule fin de s’accaparer l’uniforme, le grade qui y figure et, par-dessus tout, l’influence qui en procède ».

Il n’en faisait d’ailleurs pas secret, quand bien même ne le criait-il pas sur tous les toits ; Louis-Jin Bestag ne voyait dans la Marine que la voie royale de la politique. Qui montait en grade, dans un monde trouvé sous l’envol de la Mouette, gagnait nécessairement en pouvoir. Et le pouvoir, s’il le désirait, ce n’était qu’afin de ne pas être du mauvais côté du manche, comme cela était présentement le cas, sous la férule de cet officier instructeur sans doute aussi mesquin qu’il l’était lui-même.

- Encore ce complexe de persécution, encore et toujours. Voyez que je viens à vous les mains pleines de présents, et je ne trouve, en retour, que l’ingratitude de mes affidés. Le lieutenant Farjilles affecta un soupir théâtral, puis reprit. Et dire que je venais justement pour vous récompenser de vos résultats. Vos travaux sur les ondes escargophoniques ont fait bien des remous jusque dans des strates plus élevées de l'amirauté. Aussi… m’étais-je dit… que vous seriez un candidat tout trouvé pour un exercice à même de faire honneur à votre palmarès.

- C’est bon, annonça le matelot sans qu’il n’eut paru prêter attention à ce qui venait de se dire, mon paquetage est prêt, on y va.

Un brin désarçonné par cette réponse, ses deux « rémoras » cherchant même à fuir son regard, gênées qu’elles furent de le voir humilié, le lieutenant-instructeur, quoi que vexé, jura les lèvres closes qu’il se vengerait bien assez tôt d'un pareil manque de respect. N’était-ce d’ailleurs pas à cette seule fin qu’il était entré dans le dortoir ?
Nul n’ignorait la jalousie qui l’animait lorsqu’il évoquait les exposés techniques de son élève. Celui-ci, à ses yeux comme à ceux de tout homme portant l’uniforme par ailleurs, n’était qu’un vulgaire expert escargophone grimé en Marine. Le consensus, alors, se dressait contre lui.

- Vous partez demain à la première heure. Conclut sèchement l’instructeur avant qu’il ne tourna les talons.

Une fois dos tourné à ses élèves, les greluches qui l’accompagnaient ne manquèrent pas de toiser ces derniers d’un regard dédaigneux. Par les mansuétudes qu’elles accordaient au « maître », elles se savaient au-dessus de la mêlée, sûres de leur bon droit et assurée de leur rang à la sortie de l’école. Le lieutenant s’interrompit cependant alors qu’il s’apprêtait enfin à quitter la pièce.

- Ah. Oui. J’oubliais. Le commandement m’a demandé de désigner deux matelots. Quelle plaie. Alors, euh… Am Stram Gram… pique et pique et… Janson ; cadet Janson, pour vos résultats ou je ne sais quoi, vous avez l’honneur et le privilège d’être… enfin, faites- votre paquetage, vous partez demain.

- Oui mon lieutenant ! Répliqua avec enthousiasme un aspirant qui ruminait alors son dépit derrière le protocole disciplinaire.

Leur instructeur avait alors à peine quitté la pièce que le dommage collatéral de la sélection attrapa Louis-Jin au col. Ce dernier lui tremblait déjà entre les doigts, ses mains moites prestement levées en signe de reddition, son habituel sourire artificieux apparaissant encore plus crispé qu’à l’accoutumée.

- Qu’est… qu’est-ce que j’ai fait ? Geignait-il déjà.

Il ne jouait alors les impertinents qu’à condition de se savoir en position de force. Aussi, s’il s’était su à l’épreuve des balles avec Farjilles car celui-ci préféra l’envoyer à North Blue que le sanctionner, son sort était nettement compromis désormais que ses condisciples l’encerclaient.

- Si t’étais pas ce que t’étais, Bestag, jamais il serait venu nous emmerder avec son exercice. Si j’en suis, c’est rien que parce que j’étais dans les environs.

S’être trouvé si proche d’un paratonnerre ne lui avait en effet pas porté chance après la visite inopinée.

- Tu vas voir, toi, le jour de l’exercice, tu vas voir.

Sa menace ainsi formulée, moins subtil que ne l’était le lieutenant dans l’expression de ses griefs, l’aspirant Janson projeta Louis-Jin contre le mur trouvé derrière lui. Le tabasser ici aurait créé du tumulte et prêté le flanc à la sanction disciplinaire.
À peine remis de ses émotions, en proie pour ce jour à la vengeance de deux hommes, le mal-aimé de ces dortoirs réarrangea son col et le fichu bleu de son uniforme d'aspirant. Ce n’est que lorsque le reste de la meute cessa de l’agonir de reproches et d’injures qu’il effaça son sourire peureux derrière une grimace renfrognée et un regard mauvais.

- Quand je vous aurai sous mes ordres… souffla-t-il avec aigreur en s’assurant qu’on ne l’entendit pas.

Du fait qu’on l’avait si bien persécuté, Louis-Jin n’avait alors que mieux cultivé ses ambitions mesquines. À la vitesse d’un escargot, il essuierait les crachats et les brimades, mais escaladerai lentement et sûrement l’échelle hiérarchique. De là haut, il anticipait déjà le jour où il couvrirait de glaviots ceux qui l’avaient offensé.
Il faisait toujours bon de se méfier des teigneux ; car s’ils s’illustraient par leur faiblesse et leur impuissance, cela ne les empêchait pas d’avoir un projet défini et de s'y consacrer.

***

- Vous avez été sélectionnés par vos instructeurs car vous êtes les meilleurs dans votre spécialité disciplinaire. Navigation, artillerie, reconnaissance… communications escargophonique c’te blague, sans compter le reste. Si on vous a conviés à cet exercice c’est avant tout car…

La litanie se poursuivait alors inlassablement, Louis-Jin s’efforçant de ne pas s’assoupir à faire semblant d’entendre un discours grandiloquent et formaté qu’ont leur chantait avec la prose d’un rustre. Avec le sergent en bruit de fond, au repos, aligné avec les « élus » venus se consacrer à l'exercice, le cadet Bestag observa du coin de l’œil ce qui complétait le troupeau. Ils étaient dix en tout, l’air redoutable pour la plupart.
Pourvu cependant d’un complexe de supériorité mal placé, L-J étouffa un ricanement de mépris alors qu’il se disait qu’ils avaient tous l’air redoutable jusqu’à ce qu’une balle perdue ne les trouva. Il n’était que trop lucide sur la réalité de la guerre pour mépriser la viande à charnier dont il aspirait pourtant à être un membre éminent. Pour sa gueule cependant.

De ce qu’il avait écouté – très distraitement toutefois – on les avait assignés à deux équipes de cinq. L’équipe Alpha serait chargée de défendre un fort en ruine dressé sur un modeste récif très au loin. L’équipe Bravo, quant à elle, se verrait confier une goélette, serait chargée de trouver le fort et le conquérir.

- … et surtout, l’honneur ! Des questions ?

- Oui.

- Oui, sergent !

- Oui sergent ! Se corrigea Louis-Jin, suintant de lâcheté alors que, légèrement recroquevillé sur lui-même, il avait levé une main hésitante. Étant donné qu’on parle d’une offensive, est-ce qu’il serait pas judicieux qu’on ait trois fois plus d’effectifs ? C’est ce que prévoit le manuel, non ?

Pareil exercice n’avait alors pas été pensé dans les grandes largeurs. L’équipe attaquante, à effectifs égaux, n’avait pas la moindre chance de succès. D’autant que le fort, pour déliquescent qu’il était, se trouvait en plus équipé d’un canon armé de munitions à peinture.

- Et alors, cadet, ça vous pose des soucis ? Bah c’est le cadet de nos soucis. Vous avez rien écouté ou quoi ?!

Il n’avait effectivement rien écouté.

- C’est un exercice de situation d’urgence. À situation donnée, effectifs donnés ; on fait avec ce qu’on a. Le but est pas d’évaluer la victoire de tel ou tel, mais d’évaluer comment vous vous adaptez en situation d’urgence.

- Ouais mais…

Le sergent sursauta presque de voir qu’un élève se permit de le reprendre. Trop libre penseur pour être un bon Marine, il arrivait – souvent – que Louis-Jin s’oublia et passa outre ce qu’entendait la discipline. Il avait beau exprimer la veulerie sinon l’incarner, rétracté qu’il était contre lui-même, à suer légèrement et fuir le regard du sergent, le cadet Bestag était trop effronté malgré lui pour qu’on ne le trouva pas audacieux.

- … dans quelle situation d’urgence, exactement, on pourrait être amené à vouloir conquérir une forteresse en mer. C'est que ça se planifie ce genre de choses.Parce que…

- SILENCE !!!

Et le silence se fit tout aussitôt. Car le cadet Bestag, s’il était indiscipliné, n’était pas non plus franchement téméraire.

- C’est un exercice ! Alors cadet, tu t’exerces et tu obéis.

- Oui, sergent. C’est rudement bien dit sergent.

Parmi les instructeurs réunis, comprenant quatre lieutenants et un commandant chargé d’encadrer l’événement, Farjilles buvait du petit lait à voir sa recrue s’enterrer avec tant de dévouement. Les affaires, pour lui, débutaient divinement.

La première équipe, dont ne fut pas L-J, avait été envoyée deux heures avant, afin qu’elle occupa judicieusement sa forteresse et s’apprêta à recevoir les assaillants. La petite goélette, quant à elle fut appareillée à la mi-journée, dans des conditions climatiques favorables à la traversée.

- Cadets ! Je suis l’aspirant Clabrin, spécialiste en stratégie maritime. Présentez-vous.

À peine grimpé à bord, et sans enthousiasme, Louis-Jin soupira. Il n’aimait décidément pas lorsque quelques personnalités marquées s’imposaient comme des chefaillons et y allaient de leur exigences.

- Ostrog ! Se mit au garde-à-vous le plus opulent des cinq, lui apparemment décidé à jouer le jeu. Comptez sur moi pour la plongée et les approches furtives de l’îlot. Je peux tenir quinze minutes en apnée.

Un certain expert escargophonique, derrière lui, roula des yeux, se réfrénant de préciser qu'il n'y avait rien d'étonnant à ce qu'un cétacé sur pattes soit capable de pareille prouesse.

- Moi c’est Milie Pliren, je serai votre navigatrice.

Plus timide que les deux précédents mâles, la jeune fille se raidît plus maladroitement au garde-à-vous qu'eux après qu’elle se fut présentée.

La quatrième du lot était quant à elle versée dans la charpenterie, le stratège comptant sur elle pour des réparations éventuelles.

- Quelles réparations ? Avait-on marmonné pernicieusement, quoi qu’un peu trop fort pour être inaudible. On va nous tirer dessus avec de la peinture.

- Et toi ?! L’avait repris le chef d’expédition auto-proclamé. C’est quoi ta spécialité ?

Bien qu’il ne lui reconnaissait aucune autorité et qu’il se permettait même de le prendre de haut, Louis-Jin, parce qu’il était pleutre, se mit instantanément au garde-à-vous, rivalisant d’obséquiosité avec ses camarades, pour annoncer fièrement :

- C...cadet Bestag, monsieur ! Je suis expert en escargophones.

Un silence – auquel il n’était que trop habitué lorsqu’il se présentait en ces termes – se profila aussitôt. En dépit de l’humiliation, L-J s’efforça d’être digne, cambré plus que de rigueur au garde-à-vous, détournant toutefois le regard, honteux de se savoir être ce qu’il était, mais toujours avec cet incorrigible sourire péteux.

- Ah. C’est toi. On a tiré le gros lot. Écoute, vu qu’on a juste un escargophone par équipe, et qu’il sert juste au commandement pour nous joindre… tu vas… tu vas t’occuper de la cuisine.

- Ou… ouais, le suppléa Ostrog, en levant l’index pour rajouter, on ne peut pas entamer une manœuvre aussi périlleuse le ventre vide.

- Exactement ! Rempila la navigatrice. Tous… tous les rôles importent dans un travail d’équipe.

Eux aussi s’efforçaient du mieux qu’ils purent de ne pas croiser les yeux de leur condisciple. Celui-ci conserva son sourire vacillant, un peu plus assassiné par chaque nouvelle remarque condescendante qui lui fut adressée. Ainsi alla-t-il bien assez tôt dans la cale du bateau concocter de quoi mener la mission à bien.
Farjilles aurait joui s’il avait été témoin de la scène. Mais il était, avec les autres officiers, resté sur un récif, équipé de jumelles pour observer l’action au loin. Il se sentit par ailleurs fort dépité de ne pas trouver son souffre-douleur sur le pont qu’il observait, celui-ci déjà affairé en cuisine, loin de tous, là où il pouvait parler le verbe haut sans qu'on l'entendit.

- Ah les enfoirés ! Je… je t’en foutrai du travail d’équipe, moi. Les escargophones c’est pas important peut-être ? C’est pas important les escargophones ?! La blague.. La bonne blague ! C’est… c’est la base de tout. La communication c’est… c’est l’information et l’information bah… c’est stratégique ; c’est comme ça qu’on les gagne les guerre bande de… de… Ah les enfoirés !

Sa rancœur ainsi postillonnée en cuisine tandis qu’il jetait le tout venant dans un immense saladier, Louis-Jin se montrait ainsi fidèle à lui-même, à ne jamais dire ce qu’il avait sur le cœur à moins d’être en position de force. Sa lâcheté proverbiale faisait ainsi le lit de son hypocrisie patente.
Sa popote achevée, là où y avait aussi coulé, outre ses postillons de rage, ce qu’il fallait de morve et des larmes pour qu’il n’eut pas à saler, le chef s’en allait régaler ses ouailles. Ceux-là ne donnant de toute mabu-re pas cher de sa peau pour ce qui tiendrait de l’exercice.

- Voilà, voilà, c’est prêt ! Gaspacho à la mode de Nuvare. Bon appé...

Personne ne parut lui prêter la moindre attention, le petit groupe préférant discourir de la suite des événements autour du gouvernail tandis que la plus revêche du lot parut se trouver quelque peu en retrait.

- C’est bon, j’aperçois les contours du fort, cap ouest-sud-ouest toute ! Déclara avec emphase leur stratège en pointant leur objectif du doigt.

- Aye, aye cap’taine ! Parut s’amuser Milie.

Entre eux déjà, une alchimie s’était orchestrée comme cela se passait entre les éléments les plus sociables de la société. La « synergie fonctionnelle de groupe », comme on l’appelait en jargon militaire, Louis-Jin en était comme qui dirait exclu par défaut, faute d’avoir en lui de quoi intimer la sympathie à son égard.

Leur navigatrice avait à peine fait bifurquer le bâtiment que, sous la soudaineté de la manœuvre, chacun s’accrocha au bastingage. Chacun, à l’exception de celui qui, entre ses mains, tenait un saladier plein à ras-bord de potage à la tomate. Déséquilibré par le revirement soudain de trajectoire, il chancela, tituba avant de s’effondrer pitoyablement sur le sol de tout son long. On n’aurait su en espérer davantage d’un aspirant officier aussi illustre.
Resté quelques secondes à terre, quand bien même s’y trouvait-il étalé la tête la première, le gaffeur fut comme galvanisé lorsque résonna le doux son de l’escargophone rugissant. Bondissant presque sur l’appareil, désireux de se montrer utile en exerçant son expertise – qui ne se borna qu’à décrocher le combiné – enfin allait-il contribuer à la synergie de groupe.

- Cadet Basteg… non ! Bestag ! Oui, voilà ! Cadet Bestag, j’écoute.

Entre la nervosité et sa précédente chute, là fut la meilleure prestation qu’il se trouva en mesure de formuler. Une voix forte, assez audible pour que chacun entende, y alla d’un coup de semonce tonitruant.

- Bon sang mais... Comment est-ce que vous avez fait votre compte ?! Vous n’êtes même pas à portée du fort et il y en a déjà trois d’éliminés dans votre groupe !

Louis-Jin resta un chouïa interloqué, ingénu de ce qu'on lui annonçait là, puis se tourna en direction de la fine équipe à laquelle il n’avait pas prêté attention suite à sa chute. À l’exception de la charpentière, tous se trouvaient couverts de rouge ; imbibés du résidu de saladier qui leur était tombé dessus par maladresse.

La tête à Louis-Jin:

- Mais c’est… c’est pas de la peinture commandant, c’est du gaspacho, même que c’est à la mode de Nuvare.

- À d’autres ! Les cadets Ostrog Clabrin et Pliren sont éliminés. La mission continue. *Gatcha*.

Après que chacun ait entendu la sentence, Louis-Jin hésita quelques temps avant de se tourner vers ses camarades. Puis, la main derrière la tête, avec son sourire faux et mal assuré, il tira la langue et leur dit :

- Déjoléééé ♥

Le concert des complaintes monta aussi vite dans les graves que les aigus. Quelques projets très peu louables furent dressés sur le tas, tous tournés vers un individu en particulier qui, accroupi, se protégeant avec ses bras et la tête tournée, déclara :

- A… arrêtez, le sergent a dit que si les participants éliminés aidaient ou attaquaient un joueur même allié, hein !, ça serait dans leur rapport.

Ainsi le couperet académique tempéra le lynchage qui se profilait. Tenus de tous rester assis là où ils avaient été « exécutés », la troupe de bons élèves alla se lamenter au milieu du « sang » abondamment versé.

- Bon, annonça le responsable de la catastrophe en allant à la rencontre de la survivante de l’holocauste à la tomate, bah il reste plus que nous deux. Je suis Louis-Jin, mon truc à moi, c’est les escargophones. On va... on va faire au mieux, d'accord ? Concluait-il alors avec son sourire veule et son regard fuyant.

Et de ce seul camarade qui lui resta, la Bunny devrait s’efforcer d’en tirer le meilleur parti ; car c’est à eux deux seulement qu’ils iraient s’emparer de la forteresse. Jamais auparavant l’exercice n’avait alors aussi bien simulé une situation d’urgence désespérée. De loin, une paire de jumelles dans la main, une boisson sirotée à la paille dans l’autre, le lieutenant-instructeur Farjilles se délecta de la débâcle par-delà ses espérances.

- Que du bonus. C’est que du bonus. Ricana-t-il alors à mots couverts sous le regard interrogateur de ses confrères.

Technique et objet utilisés:


Dernière édition par Louis-Jin Bestag le Mar 14 Mai 2024 - 17:12, édité 2 fois
Bunny Joy

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Bunny Joy
Lieutenant
Lun 13 Mai 2024 - 19:26
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Non, sérieusement ? Qui lui avait coltiné des bouseux pareil ? Elle commençait à se demander si son sergent instructeur n’était pas, soit un trouduc de première, soit qu'il la détestât u plus haut point. Lui coller des bras cassés comme partenaires n’améliora pas l’humeur du jour de notre lieutenante. Déjà qu’elle était jamais vraiment au beau fixe, voilà qu’elle devenait sombre … Son teint se fit plus blafard, des pensées sombres dans la tête, les yeux dans le vague, elle semblait murmurer dans sa barbe inexistante des ignominies qui auraient fait frissonner le péquin moyen, voir même faire trembler les grands et puissants de ce monde. Un mélange mélodramatique et caustique, arrosé à la sauce acide dont elle avait le secret.
On lui parlait. Elle ne tourna pas le regard vers le dénommé Louis-Jin, responsable –pour une partie, de son malheur. Que le gars eut l’idée de préparer un plat à base de tomate quand l’exercice demandait de ne pas finir tout rouge, passe encore. Que les autres trouffions ne sachent pas manier une barre, elle pouvait comprendre, c’était du sang neuf. Ils essayaient au moins. Mais la situation actuelle était tellement incongrue, lunaire et impromptu qu’elle ne pouvait s’empêcher de s’appuyer contre un pan de parois du bois de leur navire.

On sentait l’ambiance autours d’elle descendre de quelques degrés, et lorsqu’elle posa son regard placide, si peu volontaire, et surtout blasée sur son acolyte… Non, il n’était pas le seul responsable. Ils étaient tous responsables. Même elle. Les battements d’aile d’un papillon peuvent déclencher des typhons ? Un seul cadet de l’académie pouvait ruiner sa journée et son exercice en trébuchant… Et que dire de tous les autres, incapables d’esquiver un simple ragout de tomate ?! Vraiment, c’était du boulot d’amateur. On lui avait cochonné son putain d’état de service.

Bon. Après tout, elle n’était pas dans les petits papiers de personnes, ni la meilleure de tous. Elle était la fille d’un pirate, elle jurait tout le temps, et ne pouvait pas s’empêcher de frapper avec son marteau.

Elle lança un regard à l’autre dadais. Attrapant par le manche son marteau de guerre, elle lui fit faire quelques moulinets avant de la coller par-dessus son épaule. Contre mauvaise fortune bon cœur, aurait du être inscrit en lettre de feu dans son esprit. A la place, il y’avait écrit que taper c’était sa façon d’aimer.

Le sourire qu’elle lui envoya se voulait rassurant ? Il était tout autant inquiétant pour le gars normal qu’était LJ.

- Oui, que nous deux, mais pas des moindre ! Bunny, je l’ai déjà dis mais mon truc c’est le bois, et la charpente. Les bateaux, et la bagarre aussi.
Les autres bouillonnaient encore de s’en prendre au pauvre gars qui avait juste été trop zélé, un peu malchanceux, mais surtout bête comme ses pieds. Elle se tourna vers eux : Bon, riri, fifi, loulou, calmez vous ou c’est moi qui m’en charge. Et je peux vous dire que j’en ai déjà ma claque d’être ici, alors n’en rajoutez pas. Sinon vous tâterez de ma Diplomatie –elle tapota son marteau d’une main … Tout droit venue de Water Seven. Capiche ? Elle lut dans leurs regards qu’elle s’était fait comprendre. Les perdants n’ont pas le droit de parole, alors laissez les derniers en lice se concerter.

Elle regarda l’horizon, et le vent gonflant les voiles qui les rapprochaient de leur objectif.

- Ptain, tu sais naviguer toi ?! Elle regarda avec plein d’espoir son homologue, qui ne put qu’infirmer d’un haussement d’épaule et d’un négatif de la tête. Bon, dépêche, on va apprendre fissa comment faire ! Viens avec moi, Jean-louis, on va leur montrer qu’on peut vaincre malgré toutes les crasses du monde ! Elle avait les yeux qui brillaient d’espoir, qui tintait de courage, et semblait d’une volonté toute nouvelle.

Ils arrivèrent devant la barre, un simple bout de bois sur pivot, pas vraiment le must du must. De toute façon, c’était sûr, on leur en voulait de quelque chose. Elle trouverait bien de quoi d’autre que d’être l’engeance de Joy, lui était reproché.

Un boulet rouge passa à quelques centimètres du navire. Eh merde … Voilà que ça commence et on n’est pas prêt. Elle regarda Louis-Jin, et tira un bout de la barre. Sensation étrange quand le navire suivit ses instructions et bondit à travers les vagues et les flots, comme si elle tentait une manœuvre de désengagement … Alors qu’elle ne faisait que donner un côté du navire, une cible parfaite … Heureusement, son camarade ne l’entendait pas de cette oreille, il tira de son côté en pestant contre son inefficacité et son idiotie sotte. C’est pas comme ça qu’on va avoir nos trois étoiles, t’es bonne qu’a parler laisse moi faire ! Fit-il si fier d’avoir réussir à rétablir le cap et la situation, qu’il avait un sourire, et une voix qui lui tapa sur le système, instantanément.

- Et toi tu nous mène droit dans la gueule du loup, elle tira de son bords. Des mouvements erratiques et absolument imprévisibles firent d’eux une cible difficile à atteindre.

- Tu nous mène droit à la défaite, inconsciente ! Il tira de son bord, étonnamment fort pour sa petite stature, comme si l’adrénaline et l’arrogance –ou ce qui s’approchait de la colère chez lui, démultipliait ses forces.

- Attends, attends, tu sais comment on freine avec ce bordel ?! Lâcha-t-elle, alors que le rempart se rapprochait dangereusement du navire, ou bien l’inverse. Elle cria comme une pucelle, et ils percutèrent avec force le rempart. Un nuage de fumée, dégagé par la pierre du mur qu’ils venaient de se prendre mangea le navire comme un enfant obèse l’aurait fait d’un morceau de chocolat trainant par là.

Le nuage la fit tousser, elle lâcha la barre sous l’impact, mais se rattrapa au mat de misaine en crochetant celui-ci de ses doigts fermes et musclés.

Le choc avait été si violent, que la vigie chargée de donner l’ordre de tirer se cassa la figure, et termina sa course sur le pont du navire qui ne naviguerait sans doute jamais. C’est le vague à l’âme qu’elle arma le chien du pistolet neutralisé qu’on lui avait fournis. Et c’est toujours dans le flou qu’elle tira sur l’adversaire.

Sans pitié.

Sans sentiment.

Sans honneur.

Le rouge lui allait si bien, finalement …



Louis-Jin Bestag

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Louis-Jin Bestag
Lieutenant
Mar 14 Mai 2024 - 8:27
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Fallait-il tant aimer le pont supérieur de cette goélette, désormais reléguée au rang de simple épave, pour embrasser si passionnément, et à raison de deux fois par jour, le plancher même sur lequel on se tenait on principe debout. Il s’était encore vautré, Louis-Jin, et minablement, avec toute la disgrâce que supposa sa chute ridicule. Eut-il cependant eu le pied marin qu’il aurait tout aussi joliment trébuché, courtoisie d’une navigation en tandem dont on put néanmoins douter du bien-fondé. Que ce fut ou non bien-fondé, il étaient en tout cas bien échoués tout contre la paroi du fort. Leur seule consolation, car il en fallait une lorsque l’on merdait dans de si grandes largeurs, tenait au fait qu’ils s’étaient effectivement plantés là où se destina initialement leur échappée.

Car il fallait bien se décoller un jour de ce plancher, bien qu’il s’obstinait pourtant à le faire reluire tant il s’y était affalé honteusement dessus, Louis-Jin, Marine de son état, et quel état, prit fébrilement appui sur ses bras pour se redresser de nouveau sur ses cannes. Il chancela encore bien dix secondes d’ici à ce qu’il fut parfaitement remis de ses émotions.
Les yeux finalement en face des trous – et les bons – le cadet Bestag demeura hagard un instant, d’ici à ce qu’il réalisa où il se trouvait puis raviva sa mémoire après qu’il eut constaté le désastre.

Aussitôt tourné vers Bunny, qui n’en menait pas bien large elle non plus, il lui asséna alors, avec ce qu’il fallait d’hésitation dans le sourire et de roguerie dans la voix :

- E… exactement comme prévu !

- À d’autres ! Hurla spontanément la bagarreuse qui lui servit de binôme.

D’autres, il y en avait. À bord déjà, brinquebalés violemment puis entassés les uns sur les autres une fois le choc consumé, quatre autres en haut de la forteresse de pierre, avaient été tout aussi ébranlés par l’impact que par l’effet de surprise. Puis, au sol, on trouva là un curieux fruit tombé de sa branche après qu’on eut si bien secoué le cocotier de pierres.
Quand chacun fut à son tour remis sur de bons rails, une tête familière dépassa d’une des ouvertures au sommet du vestige.

- Bestag… ? C'est toi ? Je sais que c’est toi qui as fait ça. J’ai pas de preuve, même que j’ai pas la moindre idée de comment tu t’y es pris… mais c’est toi ! Amène-toi que je te cartouche ; et pas à la peinture, crois-moi bien.

Deux de ses camarades l’avaient alors saisi à chaque bras afin de tempérer sa rage, souhaitant qu’il ne s’exposa plus que de nécessaire au risque qu’on lui vida les munitions factices. Même après qu’il fut retiré de force, on entendit le cadet Janson hurler et jurer comme s’il avait été agoni par le Diable en personne.

Furtivement planqué derrière sa comparse, grelottant de trouille, Louis-Jin osa poindre le bout de son nez de par-dessus l’épaule de la cornue une fois qu’il eut entendu la voix s’éloigner. Puis, une fois se sachant à l’abri d’une altercation, il quitta les lombaires de sa planque de fortune, remonta son pantalon en levant le menton.

- Descends de là me le dire en face, goéland !

Afin de ne pas totalement passer pour la larve qu’il était en réalité, L-J n’avait alors pas hésité à répliquer à grands renforts de rodomontades… prenant néanmoins un soin tout particulier à les énoncer à hauteur de vingt décibels.
Située quelques mètres dans son dos, à le voir se pavaner tout en demeurant résolument lâche, l’élève Joy s’essaya à un commentaire de la situation.

- Tu le sais qu’il peut pas t’entendre, hein ? Et puis… « goéland » ?[/b]

Faisant alors la sourde oreille, faussement ingénu de sa propre lâcheté, Louis-Jin cédait d’autant mieux à pareille hâblerie qu’il se sut, à cette distance, hors de portée des crachoirs. S’il n’était pas vaillant – mais alors pas le moins du monde – il était cependant assez érudit pour savoir quand l’heure de la forfanterie sonnait. Elle sonnerait et résonnerait en tout cas aussi longtemps que les quatre bougres ne descendraient pas de leur perchoir. Ce qui était alors le scénario le plus probable étant donné que la seule sortie du fort, par une petite porte, les aurait exposés à une salve bien rouge.

- Bon. Reprit le fanfaron du moment, emporté qu’il était dans son élan. Cadette à cornes ! Transformez le bateau en tour de siège, on va les finir vous serez en première ligne, je vous couvrirai.

Ses ordres à peine proclamés, l’élève officier accusa sérieux un coup de poing sur le sommet du crâne, se recroquevillant aussitôt, les mains agrippées à ses cheveux.

- Mais t’es complètement taré ma parole ?! Déjà le bateau, maintenant ça ! Et qui c’est que t’appelles « cadette à cornes », escargogol ?!

- Bah quoi ? T’avais dit que t’étais charpentière… alors je me suis dit… gémissait déjà son condisciple une larme à l’œil tandis qu’il essuya sa bosse.

Alors affairée à lui expliquer vertement pourquoi une tour de siège ne se bricolait pas en un quart d’heure à partir de résidus de goélette, le duo fut interrompu dans son « briefing » par une voix lasse de les entendre ; lasse de les subir. Qu’il se manifesta stoppa net l’engueulade en cours.

- Quelle bande de manches. Vous croyez peut-être que vous pouvez assiéger à deux une place fortifiée en sous-effectifs, mais ma parole vous…

Leur ancien chef de groupe auto-proclamé fut alors à son tour interrompu dans le flot de ses remontrances. Louis-Jin, teigneux, était venu à lui d’un pas pressé afin de lui signifier en quelle estime furent accueillis ses conseils.

- T’en fais du bruit toi pour un homme mort. Avait-il ainsi grincé sèchement d’un sourire tremblant. Cela, avant de tendre aussitôt son mousquet en direction du « mort » pour lui annoncer avec rage : Gaspa-Shoot !

C’est alors en pleine gueule, presque à bout touchant, que Louis-Jin plomba son allié à la peinture, celui-ci expectorant douloureusement les résidus de gouache lui étant rentrés dans le nez. S’il s’était jadis presque mis à plat ventre devant ce comparse, le cadet Bestag, désormais qu’il se savait en position avantageuse par rapport à lui, l’écrasait sans remords comme s’il se fut trouvé en présence d’un insecte. Ainsi en allait-il de sa mentalité : fort avec les faibles, et faible avec les forts.
Et cet homme-là œuvrait de sorte à être officier de Marine.

Comme s’ils s’étaient ensuite coordonnés, soudain sur la même longueur d’onde après que fut si bien corrigé leur petit chef, le tandem quitta son épave pour arriver au pied du mur. Y gisait alors un élève dont les éclats carmins, venus le maculer du museau au foulard, ne semblaient pas être le fait de peinture à l’huile. La chute avait été sévère, le sang avait ainsi coulé en conséquence.

- B… bordel… qu’est-ce que vous avez fou… Aaaa...h j’ai mal, putain. A… appelez les officiers… voyez bien qu’il y a un blessé.

Debout face à lui, lui paraissant comme deux ombres oppressantes en contre-jour, ses petits camarades restèrent inertes à l’observer impitoyablement. La vent de mer soufflait alors légèrement, comme s'il se fut agi d'un souffle de mort lente.

- C’est vrai qu’il a l’air de douiller. Consentit Bunny, sans toutefois paraître s’en inquiéter ou même s’en chagriner.

Se grattant quant à lui la tempe du bout de son mousquet, Louis-Jin tourna la tête et cracha, comme s’il eut cherché à extérioriser physiquement son indifférence au sort du malheureux.

- Peuh. L'exercice, c’est une simulation que je sache, donc il simule et c’est tout.

Son raisonnement était alors d’autant plus implacable que Bunny ne se sentit pas de le contredire. Elle était aussi hermétique à la pitié que son binôme se trouva insensible au sort de quiconque autre que lui-même. Comble de la forfaiture, ce dernier alla jusqu’à tirer le blessé par son foulard afin qu’il se redressa en dépit de ses blessures. Tout le répertoire des onomatopées relatives à l’agonie avaient alors été beuglé par le « simulateur ».

Se cachant opportunément derrière lui, puis demandant poliment à Bunny de bien vouloir leur ouvrir la porte, Louis-Jin, maintenant équipé d’un bouclier humain, n’eut aucun mal à trouver le courage à s’engager parmi les escaliers traîtres et tortueux de la citadelle en ruine.

- Suivez le guiiiide. Poursuivait-il joyeusement tout en forçant un condisciple blessé à grimper une marche après l’autre.

La tâche fut cependant trop ardue pour que l’élève surmonta sa blessure à la jambe, les deux dévalant bien assez tôt les trois escaliers franchis à reculons. Paniqué après sa chute – ça n’était après tout que la troisième en ce jour – L-J chercha à tâtons le mousquet qu’il avait alors fait tomber. Soudain bien moins arrogant, sincèrement apeuré et imprégné de veulerie, il retrouva cependant un semblant de contenance lorsqu’il eut à nouveau son arme en main, essuyant la sueur de son front d’un revers d’avant bras.
Ce seul épisode, fâcheux, comme les autres, suffisait à définir quel Marine il était foncièrement. Si on pouvait encore appeler ça un Marine.

Ignorant royalement les cris de douleur du blessé agonisant à ses pieds, le cadet Bestag alla jusqu’à l’escargophone qui, depuis dix minutes ou presque, n’avait pas arrêté de sonné.

- Ma parole, c’est stressant ce bruit-là à la longue

Il avait alors saisi le combiné, l’avait soulevé comme cela était l’usage mais, plutôt que de le porter à son oreille, le réinstalla délicatement à son emplacement d'origine. Ainsi la sonnerie prit fin.

- Astucieux. Ne put s’empêcher de reconnaître la cornue sur un ton laconique.

- Qu’est-ce que tu crois, je suis pas expert en escargophones pour rien, ricana vilement son partenaire dans une série de Puru-hu-hu-hu-hu dont il avait le secret.

Se foutant éperdument de l’avis des organisateurs, pensant que ceux-là ne les contactaient que pour les informer que leur adversaire à terre était éliminé de l’exercice, Louis-Jin, accroupi sur le sol, bricola ce qu’il fallut en tapotant du majeur sur les numéros incrustés contre la coquille. Spécialiste de sa discipline, il alla au-delà de la « technique ancestrale du raccrochage au nez » pour trouver la combinaison permettant de remonter la localisation des ondes escargophoniques à portée. Une technique qui lui permettait alors de contacter l’appareil le plus proche d’eux ; celui-ci ne pouvant être que celui confié à l’équipe adverse.

S’approchant ensuite du blessé avec son sourire indécis, fielleux ainsi que ce regard peureux quoi qu’équivoque, l’expert escargophone s’accroupît de nouveau afin de tendre l’appareil au malheureux.

- Dis-leur de descendre.

- Qu… quoi ? Mais ça va p…

- Plus vite on en aura terminé avec l’exercice, et plus tôt on pourra t’emmener à l’hôpital. Dis. Leur. De. Descendre.

Pourtant élève-officier honorable, le blessé sut que des soins trop tardifs portés à ses fractures auraient été de nature à compromettre sa carrière. Une vie d’estropié pour une note, il n’en vit pas ma pertinence et, d’un mouvement leste, se saisît du combiné, un regard embué de larmes et brûlant de fureur plongé dans les yeux peureux et sournois venus lui faire face.
De dos à sa comparse, L-J, tandis que la sonnerie continuait de retentir d’ici à ce qu’on ne décrocha là-haut le combiné, interpella cette dernière :

- Dis, la cornée, ton truc à toi, tu m’as dit c’était… le bois, la charpente, les bateaux et puis quoi, déjà ?

Il s’en souvenait très bien et elle mieux encore que lui. Aussi n'ignora-t-elle pas ce qui fut attendu d’elle à présent que son condisciple, moins inutile qu’elle le crut, avait déposé les appâts. La pêche promettait d’être mouvementée.


Dernière édition par Louis-Jin Bestag le Dim 19 Mai 2024 - 8:23, édité 1 fois
Bunny Joy

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Bunny Joy
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Sam 18 Mai 2024 - 11:31
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Bien qu’elle n’apprécie pas la méthode, elle pouvait reconnaître son efficacité. Le cadet Bestag brillait d’une intelligence retorse et sacrément sadique. Jouer sur la fraternité d’une équipe, sur les dictons du genre « on n’abandonne pas l’un des nôtres » et toute cette propagande distillée pendant nos classes, c’était rudement bien joué. Elle siffla, reconnaissant par ce geste l’utilité de son camarade. Moi ? C’est la charpente, le bois … Et coller des tatanes … Qu’elle lui sorti sans hésiter, comme un slogan rudement bien rodé, sous le ciel nocturne, éclairée par la lune, elle semblait scintiller et crépiter d’une aura certaine, le genre d’ardeur qui donne aux hommes les plus lambdas l’envie de la suivre et de l’écouter.

- … Suis blessé, venez me chercher je n’arrive pas à bouger … Cette phrase la sortie de sa vigilance lunatique, comme si elle était emportée par le Momentum et qu’elle regardait l’horizon, songeuse, une nuit d’été ou les étoiles brillaient comme une myriade d’incendie de la voûte céleste ; Sauf que son regard n’était ni tourné vers l’horizon ni entrain de mirer les étoiles.

Elle comptait les secondes dans sa tête, pour se faire une idée du temps que mettrait à arriver la cavalerie à la rescousse. Elle mi K.O le cadet avant qu’il ne puisse moufté ni sonner l’alarme grâce à  un code ou autre chose de significatif pour les autres. A deux contre trois, on a des chances avec l’effet de surprise… Bestag lui sourit difficilement, trouvant peut être ses manières trop bourrues et bourrines ? Bon, à un contre trois, ça reste jouable. Il fallait rester réaliste, ce n’était pas en rêvant que l’on obtenait des résultats. Ni en bayant aux corneilles, elle mit claque à réveiller un mort sur l’épaule de son binôme.
- Cachons nous derrière ses rochers, on aura pleine vue sur notre appât, et resteront cachés du reste de la troupe … De toute façon, qu’il proteste ou pas, Bunny avait déjà pris les devant en le poussant par les dorsales jusqu’aux dents crantées qui sortaient de la mer tel une mâchoire oubliée et mal entretenue à ciel ouvert. Cette île et se fort ne lui inspirait vraiment pas confiance.

Elle compte 606 secondes … 606 secondes pour venir sauver un camarade en galère, c’était pas un record. La colère, cendre froide, se fit brasiers, attisée par le manque de compassion de ses camarades qui lui demandèrent d’un ton détaché … Alors, il reste des rescapés qu’on devrait éliminer ? Il y’en a avait même un qui, à l’aide d’une branche de bois ou une sorte de fougères rigides, donnait des petits coups dans le côtes du blessé.

-Bon, reste là, je m’en occupe. Son regard mordoré devint sombre, on ne voyait presque plus que la pupille. Elle était dans un état de transe, dans un état qui se fichait de savoir que c’était un exercice, ni que la méfiance des autres matelots venait peut être de l’exercice en lui-même.

Elle arriva presque à distance quand on la remarqua. Elle accéléra encore, abaissant son corps presque à quatre vingt dix degré par rapport au sol, évitant une première volée de tirs.

-C’est chiant les armes, peu importe leur composition ou leur puissance … Elle arma un poing en remontant perpendiculairement du plus proche…. C’est qu’il faut bien la recharger à un moment … Elle donna le coup en expirant l’air de ses poumons, ce qui fit rompre le nez de la recrue, qui saigna abondamment sur son gilet blanc. Et comme si l’humiliation d’être éliminé par une femme avec ce genre de méthodes ne suffisait pas, elle se servit de lui comme bouclier humain ; Les balles neutralisées faisaient tout de même mal à l’impact, comme n’importe qu’elle arme de ce genre. Le type expira tout l’air de ses poumons, le souffle coupé, tandis que son camarade cherchait les munitions dans ses poches, elle lui asséna un violent coup de genoux dans les parties, avant de l’attraper par la nuque quand il se plia en deux, et de sauter gaiment pour que sa tête rencontre le sol, directement.

Lui aussi saigna à tel point qu’on aurait dit qu’il avait été touché par les armes de l’exercice.

Elle tourna le regard, le troisième avait disparu. Elle récupéra les armes et munitions supplémentaire, tout en se dirigeant d’un pas tranquille, deux fusils et un pistolet dans les bras, qu’elle déposa au pied de Bestag, comme un chat l’aurait fait d’une hirondelle ou d’un rat … Cadeau mon cher, mais je crois que tu n’as pas chômé pendant que je trimais, je me trompe ?

Elle commençait tout juste à apprécier la compagnie du futur Lieutenant Louis-Jin. Et rentrer dans ses petits papiers n’était pas une mince à faire.

- Ehehehe, non, j’ai effectivement œuvré à notre réussite … Tu te souviens de ce que je t’ai dis ?

- Que tu es le plus grand expert de den den que je puisse connaitre ? Dit-elle en levant un sourcil, qui resta arqué, comme si elle doutait encore que cette spécialité soit vraiment utile en cas d’une vraie mission.

A lui de lui montrer ses tords, et de redonner ses lettres de noblesse à sa spécialité.
Louis-Jin Bestag

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Louis-Jin Bestag
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Ayant pour sa part fait preuve d’une vaillance rare, si rare d’ailleurs qu’on l’aurait prise pour de la scélératesse, Louis-Jin, puisant dans ses réserves de bravoure, s’en alla détrousser ses deux petits camarades tombés au champ du déshonneur. Sa comparse avait vertement secoué l’arbre à gogols et il était tombés deux fruits bien rouges qu’il n’avait eu qu’à cueillir sans effort. De cette approche peu conventionnelle, novatrice, et probablement contraire au code d’honneur de la Marine, les manuels en retireraient un jour ce qu’il conviendrait d’appeler « La méthode Bestag », celle-ci condensant tout ce qu’il ne fallait absolument pas faire dans le cadre de ses attributions.

Pour l’heure, tandis que l’auteur de la méthode façonna l’Histoire de la félonie en fouillant âprement les poches des deux cadets évanouis, les instructeurs du présent exercice, à la jumelle et la longue vue, maudissaient au loin la fine équipe pour les impérities flagrantes dont ils étaient les témoins médusés. Même Farjilles, pourtant bien heureux qu’on imputa une bonne part du désastre à son mésestimé disciple, eut la gorge à l’étroit dans son col en constatant qu’envers et contre tout, ce dernier n’avait pas une goutte de peinture à se reprocher sur l'uniforme.

- Alors ? S’impatientait sèchement le commandant en charge de l’exercice.

« Alors » ? Alors rien n’y fit. Bien qu’on mobilisa un chargé de communication afin que fut à nouveau contactée l’équipe B – rebaptisée depuis « équipe B...ordel de merde mais qu’est-ce qu’ils foutent ces cons-là ? » – l’appel tombait comme une bouteille à la mer ; une bouteille fêlée. Ce qu’on imputa vraisemblablement à un incident technique était cependant le fait du cadet Bestag dont son lieutenant instructeur n’ignorait rien des compétences en la matière. Celui-ci se garda toutefois d’en faire mention, craignant d’avoir à partager la foudre du commandant si celui-ci vînt à l’apprendre.

- Regarde ça, Nyny, ces couillons sont arrivés si vite qu’ils ont pris leur escargophone avec eux – alors… on bloque les communications entrantes ajoutait Louis-Jin en bidouillant avec les boutons sur la coquille spiralée, et voilà !

Il aimait à abréger les patronymes à sa manière, ceux-ci étant néanmoins toujours aussi longs une fois modelés en surnoms par ses soins, « Nyny », toutefois, était née. Son forfait accompli, empêchant alors quiconque de les appeler et de les déranger par ce biais, L-J, avec un sourire crâneur quoi qu’avec toujours cette lueur d’incertitude craintive dans le regard, exhiba sa prise. Il s’était en outre garni le futal de deux mousquets supplémentaires, n’étant apparemment jamais assez paré d’armes pour compenser sa faiblesse manifeste.

- Et à quoi ça va nous servir ? Demanda prosaïquement la cornue tandis qu’elle échauffait tour à tour ses poignets.

En guise de réponse, son condisciple resta pétrifié dans sa pose, la sueur se faisant plus abondante sur son visage. Il n’en savait foutrement rien pour l’heure ; mais il était toujours bon d’avoir trop d’escargophones que pas assez. C’était en tout cas son avis de spécialiste en la matière. Car pour un homme avec un marteau, le monde entier était un clou.
Le fait que ça ne leur servait à rien.

- Peu… peu importe ! Se justifia Louis-Jin, s’étant senti presque agressé par la plus innocentes des questions qui soit. T’es qui au juste ? La… la Marine des escargophones ? Va chier !

Il brandit ensuite un poing courroucé en exhibant une petite trogne de teigneux vexé jusqu’à ce qu’il se ressaisît soudain. De là, il se leva du corps évanoui du cadet Tchekov, désormais délesté de ses effets et, un mousquet dans chaque main, joua au brave. Un jeu dont il n’était cependant pas expert pour dire le moindre.

- On va s’en aller repeindre ces gougnafiers, avait-il alors déclamé gravement comme s’il se fut agi d’une réplique de roman. Cela, avant d’ajouter d’une petite voix peureuse, tu passes devant, je te couvre.

Techniquement, si elle le devança dans les dédales tortueux de l’escalier en colimaçon qui les attendait, ce serait alors elle qui l’aurait couvert de son corps. De cela, Bunny n’en était pas dupe, et se contenta de marmonner un commentaire désagréable avant de prendre les devants. Car il fallait bien finir de conquérir le fort après tout. À peine entrés, ils s’étaient alors extraits des yeux indiscrets de leurs officiers qui, sans pouvoir les contacter ni les observer à distance, n’avaient plus aucune emprise sur les événements. Si l’organisation de cet exercice avait été évalué, pas un seul parmi eux n’aurait été lauréat, si ce n’est peut-être du titre de bleusaille de l’année.

Collé dans le dos de sa binôme après avoir achevé de détrousser le corps, prenant soin d’épouser sa silhouette afin que pas une goutte de peinture ne lui glissa sur la peau si elle vînt à se faire canarder, Louis-Jin évoluait à pas prudents derrière sa bourrin de service. Plus haut, quelqu’un tambourinait à la porte, sommant avec véhémence de bien vouloir lui ouvrir. De toute évidence, le seul cadet à ne pas être descendu avec le trio s’était cloîtré au sommet du fort, craignant d’entrebâiller la lourde porte en bois de peur qu’un malfaisant ne s’y engouffre.

- À chacun ses lâches j’imagine...

- Quoi ? Demanda ingénu le cadet Bestag, celui-ci n’ayant sincèrement pas compris que la réflexion lui était adressée par ricochet.

- Non, rien.

Profitant de la discorde interne de l’équipe A – ou de ce qu’il en resta – les assaillants arrivèrent dans une grande salle de la ruine fortifiée, là-même où le cadet Janson s’acharnait sur la porte avant de subitement faire volte-face et d’ouvrir le feu. Malgré une approche discrète pourtant effectuée à pas feutrés, il avait aussitôt dégainé dès qu’il sentît ses deux adversaires approcher dans son dos. Darnel Janson n’était alors pas en passe de se trouver lauréat de sa promotion pour rien.

Attentive pour ce qui la concerna, Bunny esquiva sans peine les projectiles d’un bond latéral, laissant son fidèle acolyte essuyer les plâtres et, par voie de fait, la peinture venue aussitôt lui maculer le maillot. Farjilles, du fait des murs épais de l’enceinte, n’avait alors pas pu savourer ce moment, si loin qu’il se trouva. Louis-Jin Bestag avait alors été éliminé à son tour.

- Dès que j’en ai fini avec ta copine, Bestag, je leur dirai que t’es tombé dans l’escalier. Assura Darnel.

- Je m’en fous, je suis déjà mort, je sentirai r…. ah oui, mais attends, je suis pas mort pour de vrai en fait
………….
ÉCLATE-LE NYNY ! POUR LA MARINE ! OU POUR CE QUE TU VEUX EN FAIT, MAIS PAR PITIÉ, MASSACRE-LE !


Ce cri du cœur, il l’avait alors scandé avec l’énergie du désespoir, les vannes lacrymales grandes ouvertes sur un visage quelque peu crispé à l’idée de se trouver en tête-à-tête avec Janson sans que personne ne les observa.

- Mais il va la fermer… maugréa acrimonieusement Bunny qui, bien qu’agile et puissante, se surprit à échanger des coups à armes égales avec son adversaire.

Celui-ci n’avait en effet battu en retraite plus tôt qu’avec dans l’idée de la prendre de revers pour avoir le dessus, sachant qu’il bataillait à armes égales avec elle en terme de puissance. Peut-être même avait-il le dessus alors que ses coups portaient plus sévèrement, propulsant l’élève officier contre les murs à plusieurs reprises. Janson avait clairement l'ascendant, économe de ses munitions dont il ne l’aurait couverte qu’une fois celle-ci hors d’état de nuire.

Lorsque, dissimulée dans la poussière levée par leurs échanges de coups, Bunny s’était judicieusement cachée derrière une des caisses entreposées dans la salle, le condisciple avec lequel elle se trouva en jouta fit preuve de réserve. À lui seul, il incarnait de meilleur de Louis-Jin et Bunny, alliant puissance et prudence dans une harmonie qui lui profita bien.

C’est alors, après qu’il chercha du regard où la cornue put bien se tapir, qu’un bruit strident retentit, le conduisant à se retourner brusquement, de nouveau prêt à l’offensive. Il n’avait alors virevolté que pour un malheureux « Puru puru puru », prêtant le flanc à une attaque cinglante qui lui vînt aussitôt d’un angle mort. Recroquevillé au sol, un main portée sur le flanc si rudement attaqué, il aperçut dans l’ombre de la cage d’escalier une silhouette qu’il ne détestait que trop contempler.

- T’étais censé être mort ! Se plaignit-il ensuite comme l’aurait fait un enfant à la récréation face à une tricherie d’un petit camarade.

Louis-Jin, bien que peinturluré dans les grandes largeurs, avait usé des deux escargophones en sa possession – en ayant jeté un dans le dos de Janson le temps du tumulte – afin de le contacter au bon moment pour que put poindre une diversion. L’escargophone de Tchekov, finalement, leur fut d’un précieux secours.

Sortant de la pénombre d’un pas lent et théâtral à bien des égards, se doudant que son camarade ne lui sauterait pas à la gorge après qu’il fut bien en peine de se tenir vautré au sol, le cadet Bestag parada augustement ; d’autant plus qu’il était immaculé. Si Janson fut le premier surpris de ne lui trouver aucune goutte de peinture sur l’uniforme, Bunny ne se trouva alors pas loin derrière à s’étonner d’un tel miracle.

- Eh oui, se flatta l’expert escargophonique en soignant son entrée, je suis Louis-Jin le Blanc, revenu d’entre les morts car béni de Poséidon, désigné par les Abysses afin de mener à bien une sa missi…

- Aaaaaah, j’y suis. C’est pour ça que t’as pris l’uniforme de l’autre tout à l’heure. Tu m’as fait peur, je croyais que c’était pour voir ses tétons.

Sa binôme, si elle n’était pas futée outre mesure, savait toutefois additionner un et un. Le miraculé, finalement, ne le dut qu’à un uniforme de rechange usurpé à un des cadets blessés uniquement au visage.

- Qu… tu… Tais… tais-toi ! Se froissa Louis-Jin d’avoir été si facilement percé à jour. N’offense pas la volonté de Poséidon ! Avait-il ajouté en la braquant de son escargophone puis, tenant compte de la méprise, en la braquant d’un de ses mousquets.

Ces manigances de maternelles, pour piètres qu’elles furent, restaient néanmoins orchestrées à l’abri des jumelles de leurs instructeurs. Chaque uniforme étant pareil à un autre, sans rien pour les distinguer, Louis-Jin avait ainsi contourné le système en lisant à travers les lignes du règlement.
À quoi ça tenait, une résurrection, finalement ?

- B...Bâtard ! Avait fulminé de toute sa frustration le lauréat de sa classe en frappant du poing au sol.

Louis-Jin, maintenant en position de force, ne tremblait plus face à son puissant condisciple, n’hésitant pas à le toiser de haut bien tout en chargeant lentement et délicatement son mousquet.

- Ça se prononce « Bestag ». Avait alors renchéri fier de lui le sournois personnage. Avec un « B », comme dans « Byyyyye byyyyye » ♪

Il usa alors de trois billes de peinture afin de couvrir son adversaire des pieds à la tête. Lui n’échapperait pas à la « mort » avec des vêtements de rechange, maculé de rouge jusqu’au cuir chevelu. D’autant moins que Louis-Jin, son forfait accompli, assomma mesquinement un homme à terre en usant de la crosse de son mousquet à vingt-huit reprises au moins avant de parvenir à ses fins. Il parut d’ailleurs presque aussi éreinté que Bunny une fois sa besogne terminée.

- Plus… plus qu’un. Annonça-t-il en s’essuyant la sueur du front tandis qu’il reprit son souffle d’avoir fait si peu de choses.

La porte en bois qui les séparait du dernier des élèves-officier était un ouvrage ancien, lourd et plus résistant que de la pierre. Même Janson n’y était venu à bout. Il s’agirait du dernier obstacle à franchir avant d’espérer arracher la victoire à l’équipe A. L’affaire, cependant, paraissait mal engagée. L’exercice devait se solder avant la nuit et, dans l’horizon lointain, bien qu’ils ne l’aperçurent pas du fait qu’au centre de la pièce, ils n’avaient accès à aucune fenêtre, le soleil gagnait déjà en teintes orangées.
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